Une redécouverte à vallauris : l'atelier Auguste

Une vente aux enchères d’une partie du fonds d’atelier a eu lieu le 25 octobre 2022 révélant la singularité de style de Robert et Gyn

Lorsque Robert et Gyn se rencontrent, ils sont en formation à Montpellier, à l’école professionnelle de Fontcarrade, dont le programme consiste à former de jeunes gens à la poterie afin d’en faire leur métier. Dès cette époque, ils rencontrent Frédérique Bourguet qu’ils retrouvent quelques années plus tard à Vallauris où elle s’est associée à Isabelle Ferlay pour former le duo bien connu Les Argonautes. Ce village, idéalement situé près des stations balnéaires de la Côte d’Azur, est le premier lieu où s’établissent les Auguste, en 1952. Ils y côtoient toute la fameuse bande de Vallauris. Parmi eux, Suzanne Ramié collabore déjà avec Pablo Picasso tandis que Roger Capron et Robert Picault emploient des dizaines de potiers et font tourner leurs manufactures de manière artisanale. Les uns et les autres ont des pratiques d’atelier variées, leur production exprime cette vie communautaire fourmillante qui s’élabore à travers le travail, les dîners, les fêtes et les réunions du Parti communiste.

Robert Auguste avec Picasso, Vallauris
La bande de Vallauris

À cette époque, leur production est déjà polymorphe : l’approche résolument moderne et libre du duo formé par Gyn et Robert est remarquable et chacun travaille aussi dans d’autres ateliers. Gyn réalise des décors chez leur voisin Jacques Lignier, tandis que Robert travaille comme tourneur auprès d’Odette Gourju Naumowitch et de son mari Ljuba (parents de Jacques Innocenti), à l’atelier du Grand Chêne.

Leurs créations, signées RGA Vallauris, RGA, R et G Auguste, RA, GG, Gyn, révèlent des pièces culinaires mais aussi des pots aux allures sculpturales et des panneaux aux décors peints qui prennent une dimension bel et bien artistique, au-delà du seul sens de l’usage – c’est ce que cette vente met en lumière.

J’ai d’abord découvert le travail des Auguste grâce à l’évocation de leur atelier et de leur participation aux expositions annuelles du Nérolium dans l’ouvrage de référence d’Anne Lajoix, L’Âge d’or de Vallauris (les éditions de l’Amateur, 1995). Puis j’ai eu la chance de découvrir leur atelier dans le Gard, dès lors, je n’ai eu de cesse de rencontrer, discuter, rechercher des indices, des témoignages et des archives pour partager l’histoire de ce couple d’artistes-artisans. Le talent de Gyn Gausserand et Robert Auguste, alliés de toujours, est d’avoir su développer tout au long de leur vie un vocabulaire de formes très identifiable présent dès les débuts de leur activité. Cette fidélité à leur style est vérifiée par les nombreuses images d’archives et par des signatures de toutes époques présentant d’infimes variations de décors.

Ils ont par ailleurs réussi à penser leur autonomie en quittant Vallauris, pour le Gard donc. Le plus important était de faire et de se rendre disponibles à la rencontre dans leur atelier, lieu du travail et de la vente.

La monographie en cours de réalisation a pour enjeu de mettre en évidence les aspects techniques, idéologiques, culturels de cet atelier actif pendant plus d’un demi-siècle.

Il ne fait aucun doute que cette première vente réunissant de nombreuses œuvres provenant de leur fonds d’atelier, et représentant différentes périodes de leur production (production remarquable également par sa quantité, ainsi que le révèlent les carnets de commandes, ou les bons de livraisons de terre que j’ai pu consulter), suivie par la publication de leur monographie (Dent-de-Leone & IRIS éditions, 2023) incitera d’autres amateurs de ce magnifique travail à partager leurs collections, en dévoilant des pièces encore inconnues du grand public.

Graziella Semerciyan

Autrice de la monographie Pots, Robert Auguste & Gyn Gausserand*